Le tribunal du régime approuve la diffusion non autorisée du documentaire "La Habana de Fito" à la Télévision Cubaine

Le Tribunal de La Habana a rejeté la demande du cinéaste Juan Pin Vilar après la projection non autorisée de son documentaire "La Habana de Fito", suscitant des critiques pour atteinte aux droits d'auteur à Cuba.

Images du documentaire "La Habana de Fito"Photo © Capture d'écran vidéo YouTube / Bande-annonce La Habana de Fito

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Le Tribunal Provincial de La Havane a rejeté la demande déposée par le cinéaste Juan Pin Vilar contre le Canal Educatif, qui a diffusé son documentaire "La Havane de Fito" sans son consentement.

La décision judiciaire a suscité une vague de critiques dans le secteur culturel cubain, dirigées par l'Assemblée des Cinéastes Cubains, qui dans un communiqué a considéré le jugement comme un précédent néfaste pour les droits d'auteur sur l'île.

Captura d'écran Facebook (fragment) / Assemblée des Cinéastes Cubains

La controverse a commencé le 10 juin 2023, lorsque le Canal Educatif a diffusé le documentaire, encore en phase de post-production, durant l'émission "Spectateur Critique".

Cette action a été réalisée sans l'autorisation de son directeur ni du producteur Ricardo Figueredo. Bien que l'œuvre ait été présentée précédemment au Havana Film Festival de New York en tant que copie de travail, sa diffusion à la télévision nationale a été considérée comme une violation des droits d'auteur par la communauté artistique.

Réactions de l'Assemblée des Cinéastes Cubains

Dans son communiqué, l'Assemblée des Cinéastes a dénoncé les irrégularités commises lors du processus judiciaire et a vivement critiqué la décision du tribunal.

Selon le document, le jugement a porté atteinte aux droits de tous les créateurs cubains, qui seraient désormais exposés à ce que leurs œuvres soient utilisées sans leur consentement, même si celles-ci ne sont pas achevées.

Entre autres points, l'Assemblée a souligné que :

La Télévision cubaine a diffusé le documentaire à une heure de grande écoute sans posséder les droits légaux de l'œuvre, qui appartiennent exclusivement à ses créateurs.

2. Le tribunal a ignoré le fait que le documentaire a été présenté dans une version inachevée, ce qui pourrait nuire à sa distribution future et à sa participation à des festivals internationaux.

3. Pendant le procès, la participation d'experts et de spécialistes proposés par la partie demanderesse n'a pas été autorisée, se limitant à écouter les représentants de Canal Educativo.

4. Le rapport minimise le concept d'auteur dans le cinéma, suggérant qu'une œuvre en cours n'a pas de protection légale, ce qui envoie un signal dangereux à la communauté artistique.

Un cas qui transcende l'individuel

L'Assemblée a également souligné que cette décision n'affecte pas seulement Juan Pin Vilar, mais qu'elle affaiblit également le système juridique de protection des droits d'auteur à Cuba.

En légitimant l'exposition non autorisée d'œuvres artistiques, le tribunal a placé les institutions culturelles au-dessus des droits des créateurs, consolidant un modèle d'impunité qui a caractérisé la relation entre le régime cubain et la communauté artistique.

Dans son communiqué, l'Assemblée a rappelé que ce n'est pas un fait isolé. Depuis plus de six décennies, les autorités culturelles ont été accusées de censure, d'exclusion et de contrôle sur les processus créatifs.

Cas récents de censure dans la littérature, le théâtre, la musique et le cinéma illustrent un tableau sombre pour les artistes cubains et leurs publics, qui voient leur accès à des expressions artistiques variées limité.

L'origine du conflit

Le conflit a escaladé après que la Télévision Cubaine ait diffusé "La Habana de Fito" sans préavis dans sa programmation.

Selon le communiqué de l'Assemblée, cette décision a été prise en réponse à des "ordres supérieurs" de l'ICAIC et du MINCULT, mentionnant particulièrement le vice-ministre Fernando Rojas, et a été exécutée de manière précipitée, sans respecter les procédures légales et éthiques qui régissent l'industrie cinématographique.

Juan Pin Vilar, qui avait autorisé une projection spéciale du documentaire à New York, a souligné que cette présentation ne correspondait pas à une première commerciale.

Lors de cette occasion, le directeur a accompagné la projection d'un message enregistré dans lequel il expliquait le caractère inachevé de l'œuvre. Cependant, les autorités culturelles cubaines ont utilisé ce précédent pour justifier son exhibition sur le Canal Educativo.

Conséquences et appel à la réflexion

L'Assemblée des Cinéastes a appelé la communauté artistique et la société civile à réfléchir sur les implications de cette décision. Selon le groupe, la décision du tribunal ne renforce pas seulement un cadre légal insuffisant, mais envoie également un message clair sur le manque de garanties pour les artistes à Cuba.

En des mots de l'Assemblée : « L'impunité devient loi lorsque les intérêts institutionnels prévalent sur les droits fondamentaux des créateurs. Cette décision non seulement porte préjudice à un artiste, mais elle nuit également au tissu culturel de la nation. »

Le cas de "La Havane de Fito" a été largement débattu depuis son origine. En juin 2023, des dizaines de cinéastes et d'acteurs ont signé une déclaration de protestation contre la projection non autorisée du documentaire, tandis que le chanteur-compositeur Fito Páez a exprimé son soutien au réalisateur sur les réseaux sociaux.

De plus, l'épisode a motivé la réactivation de l'Assemblée des Cinéastes sous une nouvelle structure, renforçant son rôle en tant que défenseur des droits des artistes dans un contexte de censure croissante.

Avec ce jugement, la situation pour les créateurs cubains devient encore plus incertaine, tandis que le débat sur le respect des droits d'auteur et la liberté créative sur l'île se poursuit.

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