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Le général d'armée (r) Raúl Castro Ruz est réapparu ce vendredi lors d'un acte officiel à La Havane, après près de deux mois d'absence publique et au terme de semaines de rumeurs intenses concernant son état de santé qui ont circulé sur les réseaux sociaux et dans les médias numériques.
L'ancien président, âgé de 94 ans, a accompagné le dirigeant Miguel Díaz-Canel lors de la cérémonie du 60e anniversaire de la création du premier Comité Central du Parti Communiste, la lecture de la lettre d'adieu du Che Guevara et la fondation du journal Granma.
L'événement, qui s'est tenu dans la Salle Universelle des Forces Armées Révolutionnaires (FAR), a réuni des figures historiques du régime, parmi lesquelles Ramiro Valdés Menéndez et José Ramón Machado Ventura.
La Présidence de Cuba a diffusé des images de l'événement sur le réseau social X, soulignant la présence de Castro aux côtés de Díaz-Canel lors d'une journée décrite comme "très émotive".
Sa réapparition survient après une longue absence qui a alimenté des spéculations sur sa santé, dans un contexte marqué par le secret officiel et la crise de crédibilité des médias d'État.
De Birán au silence
Jusqu'à présent, la dernière apparition publique confirmée de Raúl Castro a eu lieu le 13 août à Birán, lors de l'événement commémoratif pour le 99e anniversaire du dictateur Fidel Castro.
En cette occasion, le général a montré une fragilité visible et a été assisté par des responsables dans ses déplacements.
Après cet événement, son nom n'a été mentionné dans la presse d'État que de manière indirecte, en tant qu'expéditeur de fleurs ou de messages protocolaires, mais il n'a plus été vu en public.
Son absence lors des funérailles du vice-premier ministre Ricardo Cabrisas, le 17 septembre dernier, a été l'un des événements qui a le plus alimenté les soupçons concernant son état.
Mientras le reste de la direction —y compris Díaz-Canel et Valdés Menéndez— a participé à l'hommage funèbre célébré au Conseil des Ministres, Raúl n'a envoyé qu'un unique bouquet de fleurs. L'absence d'images ou de mentions directes le concernant a renforcé les commentaires sur une éventuelle aggravation de sa santé.
De la mort inventée à 'Raúl est Raúl' : La réponse propagandiste du régime
Les rumeurs concernant la supposée mort de Raúl Castro ont commencé le 22 septembre, lorsque un profil Facebook nommé 'Ignacio Giménez Cuba' a publié une version fausse de son hospitalisation à La Havane.
Sans preuves ni sources vérifiables, le texte a été diffusé par la page Periódico Patria 1892 et, à partir de là, amplifié par des médias et des utilisateurs qui l'ont cité comme une "source non officielle".
Le point de basculement est arrivé lorsqu'une page parodique de CiberCuba a diffusé un montage graphique annonçant son "décès", transformant le mensonge initial en une rumeur virale qui a circulé pendant plusieurs jours.
La chaîne de désinformation s'est achevée le 26 septembre, lorsque l'auteur même de la rumeur a reconnu l'avoir inventée délibérément pour mesurer la réaction des médias, confirmant ainsi son caractère fabriqué.
Solo alors, le 27 septembre, le régime a répondu par une campagne numérique massive sous le slogan “Raúl es Raúl”, conçue pour contrer l'impact de la rumeur et réaffirmer la vitalité symbolique du général.
Des ministères, des médias d'État et des profils associés à l'appareil de sécurité ont inondé les réseaux avec des images de Raúl en uniforme militaire, des phrases telles que « Avec le pied dans l'étrier » et des hashtags coordonnés (#RaúlEsRaúl, #YSigueAquí).
L'uniformité visuelle de la campagne —mêmes couleurs, typographie et messages— a révélé une opération de propagande centralisée, visant à projeter l'image d'une continuité politique et à neutraliser le discrédit engendré par le silence prolongé de l'exmandataire.
Une réapparition symbolique
La présence de Castro à l'événement de ce vendredi a une grande valeur politique et symbolique. Au-delà de l'hommage historique, sa réapparition fonctionne comme une mise en scène destinée à clore le cycle des rumeurs et à réaffirmer la narrative de « unité et continuité » qui soutient le régime.
Dans son discours, Díaz-Canel a évoqué la création du Parti Communiste comme une “synthèse du meilleur de la société cubaine” et a appelé à “maintenir l'unité révolutionnaire face à la guerre médiatique”.
Bien que le message se soit concentré sur le souvenir de Guevara et des fondateurs du Parti, l'allusion à une "atroce campagne de diffamation" —citée par le compte officiel de la Présidence— a été interprétée comme une référence voilée aux spéculations sur la santé du vieil général.
Entre le mythe et la fragilité
Avec cette apparition, Raúl Castro tente de montrer qu'il est toujours présent, bien que son image reflète le passage du temps et la fragilité d'une génération politique en retrait. Sa figure reste un axe de légitimité pour l'appareil du pouvoir, qui a besoin de projeter une certaine stabilité au milieu de la crise économique et du mécontentement social croissant.
La réapparition clôt, du moins temporairement, l'une des plus grandes vagues de rumeurs concernant sa santé depuis son retrait officiel. Mais elle confirme également que le régime recourt de plus en plus à la symbolique du passé pour soutenir un présent de plus en plus incertain.
Dans un pays où les citoyens comptent les coupures de courant plus que les heures de la journée, le vieux général fait son retour sur la scène non pas tant en tant qu'acteur politique, mais comme symbole d'un régime totalitaire qui refuse de mourir.
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