
Vidéos associées :
La récente vote à l'Assemblée générale des Nations Unies concernant la résolution demandant la fin de l'embargo américain contre Cuba a mis en lumière une fracture diplomatique au sein du bloc occidental.
Malgré les appels répétés de Washington à la solidarité de ses partenaires dans la défense de l'Ukraine face à l'agression russe, une grande partie des pays européens — membres de l'Union européenne et de l'OTAN — a voté en faveur de la résolution soutenue par La Havane, s'alignant ainsi avec un régime qui entretient des liens militaires, économiques et de renseignement avec Moscou.
Le contraste ne peut être plus éloquent. Alors que l'Europe demande aux États-Unis un engagement plus ferme dans la guerre en Ukraine et exige des sanctions plus sévères contre la Russie, les mêmes gouvernements qui dénoncent l'expansion impériale du Kremlin ont soutenu par leur vote l'un de ses alliés les plus anciens et disciplinés : le régime cubain.
Cuba n'a pas été neutre dans l'invasion russe. Depuis 2022, elle a ouvertement soutenu la narration de Moscou sur le conflit, votant systématiquement à l'ONU contre les résolutions de condamnation de l'agression de Poutine.
Mais c'est encore plus grave : le Département d'État des États-Unis ainsi que le renseignement militaire ukrainien (GUR) ont documenté la participation de milliers de citoyens cubains comme mercenaires dans les rangs russes, recrutés par le biais d'un réseau opérant depuis 2023 sur le territoire cubain, avec la complaisance — ou du moins la passivité — des autorités de La Havane.
En septembre 2023, l'Ukraine a averti qu'il existait “une structure organisée de recrutement” de Cubains pour combattre dans le Donbass, et que les autorités cubaines n'avaient pas pris de mesures effectives pour l'empêcher.
Des mois plus tard, des médias internationaux ont confirmé l'authenticité des contrats et des témoignages de jeunes Cubains enrôlés dans l'armée russe en échange de salaires et de promesses de résidence.
En 2024, le projet ukrainien 'Quiero Vivir' a diffusé des listes de plus de mille noms et a affirmé que le nombre réel dépassait les cinq mille. La Havane, au lieu de coopérer avec Kiev ou avec les Nations Unies pour clarifier ce phénomène, a choisi de nier son existence et d'accuser Washington de "campagnes de désinformation".
Il est donc frappant que plusieurs alliés européens de l'OTAN — parmi lesquels la France, l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne ou la Belgique — se soient joints au vote condamnant l'embargo, sans faire mention de la complicité croissante du régime cubain avec la machine de guerre russe.
Cette posture, qui répond en partie à la tradition diplomatique de l'Union européenne de rejeter les sanctions unilatérales, place l'Europe dans une position ambiguë par rapport aux principes qu'elle prétend défendre : la souveraineté des peuples, la liberté politique et les droits humains.
La contradiction est évidente. L'Europe sanctionne Moscou tout en récompensant La Havane, l'un de ses alliés les plus fidèles.
Les gouvernements européens justifient leur vote en invoquant des arguments humanitaires —l'impact de l'embargo sur la population civile cubaine—, mais ignorent le fait que le régime cubain a démontré disposer de ressources financières substantielles.
Des recherches récentes du Miami Herald ont révélé que le conglomérat militaire GAESA, contrôlé par les Forces Armées Révolutionnaires, accumule plus de 18 milliards de dollars en actifs liquides, tandis que les hôpitaux et les écoles de l'île languissent sans ressources de base.
Ce n'est pas non plus un secret que Cuba entretient des accords stratégiques avec la Russie, la Chine et l'Iran, et qu'elle a servi de plateforme d'opérations logistiques pour Moscou en Amérique Latine. En 2023, l'arrivée de navires de guerre russes au port de La Havane a symbolisé le retour de l'alliance militaire qui semblait endormie depuis la Guerre Froide.
Néanmoins, les alliés de Washington en Europe ont préféré soutenir la narrativité du "blocus", ignorant que Cuba commerce librement avec plus de 70 pays — y compris plusieurs membres de l'UE — et qu'elle importe chaque année des centaines de millions de dollars en nourriture, en machines et en médicaments depuis les États-Unis sous les exceptions légales de l'embargo.
Le résultat du vote de cette année —165 voix pour, 7 contre et 12 abstentions— a été le plus défavorable pour La Havane depuis plus d'une décennie.
Cependant, le fait que les principaux partenaires européens des États-Unis aient maintenu leur vote traditionnel en faveur du régime cubain montre une déconnexion préoccupante entre le discours européen sur la défense de la démocratie et sa pratique diplomatique.
Alors que l'Ukraine résiste sous les bombardements russes et dénonce la présence de mercenaires cubains sur le front, les chancelleries européennes semblent détourner le regard, prises entre l'inertie diplomatique et la crainte d'être accusées d'un "alignement automatique" avec Washington.
La vote de cette année ne mesure pas seulement l'influence de Cuba dans le système international, mais également la cohérence morale de l'Occident.
À une époque où l'Europe demande aux États-Unis un plus grand engagement en faveur de la défense de l'Ukraine, il est difficile d'expliquer pourquoi tant de gouvernements ont décidé de tendre la main au régime allié de Poutine, responsable de la répression interne la plus dure en décennies et de l'envoi de ses jeunes dans une guerre qui ne les concerne pas.
Peut-être que la question que Bruxelles devrait se poser n'est pas de savoir si l'embargo fonctionne, mais si l'Europe est toujours prête à fermer les yeux sur les complices de Moscou.
Archivé dans :