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Le régime cubain a transformé ce lundi le début de l'année scolaire en un nouvel exercice de propagande politique, présentant la réouverture des classes comme une victoire du modèle socialiste malgré les pénuries croissantes auxquelles font face les étudiants, les familles et les enseignants.
Dans un message sur le réseau social X (anciennement Twitter), le dirigeant Miguel Díaz-Canel a qualifié l'enseignement de « l'une des conquêtes les plus belles et vitales de la Révolution », insistant sur un discours qui ignore les problèmes quotidiens du secteur éducatif : déficit de professeurs, bas salaires, détérioration de l'infrastructure et pénurie de fournitures de base.
L'acte central pour le début de la période scolaire 2025-2026 a eu lieu à l'école pédagogique 'Tania la Guerrillera', à Pinar del Río, inaugurée il y a 50 ans par le dictateur Fidel Castro.
La ministre de l'Éducation, Naima Trujillo Barreto, a rappelé les paroles prononcées par le dictateur en 1975 et a appelé à « maintenir l'éducation universelle, inclusive et gratuite comme base de tout effort national ». Elle a également reconnu que le cours commence dans des « conditions difficiles », bien qu'elle ait présenté cette adversité comme une preuve de la résistance du système.
Le Premier ministre, Manuel Marrero Cruz, a visité la salle d'Histoire de l'établissement scolaire et a exalté la figure de Castro, exhortant à “préserver” la mémoire du leader et à la tenir en haute estime. Le scénario de l'événement, marqué par des références au passé révolutionnaire, a de nouveau placé l'éducation sur le terrain de la propagande politique, plutôt que dans une analyse réaliste des urgences des étudiants et des enseignants.
Selon des données officielles, plus d'un million 530 mille élèves ont assisté aux cours ce lundi à tous les niveaux d'enseignement. Cependant, les familles cubaines ont vécu une réalité différente de celle présentée par les discours officiels et les médias d'État.
La presse de Palacio a décrit avec un ton épique la “geste silencieuse” des pères et des mères dans la recherche de sacs à dos, d'uniformes et de fournitures scolaires, mais a évité de mentionner le coût élevé de ces articles dans un contexte d'inflation incontrôlée et de marché noir.
Le journal officiel Granma a évoqué une “allégresse” et un “fleuve d’innocence” dans les rues de Cuba, tout en passant sous silence l'effort économique que représente l'équipement des enfants pour la nouvelle année scolaire. La narration officielle a transformé la précarité en épopée et a présenté le surpassement des obstacles comme un succès collectif, renforçant l'idée de sacrifice permanent qui soutient le récit du régime.
Loin de reconnaître la crise structurelle que traverse le système éducatif cubain, les autorités se sont une fois de plus réfugiées dans l'exaltation de Castro et dans la notion de "conquête révolutionnaire". Le contraste entre la rhétorique triomphaliste et les difficultés réelles des familles marque de nouveau le début d'une nouvelle année scolaire sur l'île.
Les familles cubaines face à une nouvelle année scolaire : Entre la propagande et la pénurie
Mientras le régime cubain insiste à présenter chaque début d'année scolaire comme une "conquête de la Révolution", les familles sur l'île vivent un panorama très différent, marqué par la précarité matérielle et l'incertitude.
Le retour à l'école, qui devrait être une source d'enthousiasme, s'est transformé pour de nombreux parents en une course d'obstacles mettant en lumière les profondes fissures du système éducatif.
Dans les classes de secondaire, un cahier doit servir pour deux matières. Cette pratique, officiellement baptisée « norme ajustée », oblige à diviser les cahiers en deux ou à partager leurs pages, une solution qui vise à masquer le manque de fournitures et qui finit par affecter directement l'apprentissage des élèves.
Ceux qui ne peuvent pas payer les près de 200 pesos qu coûte un carnet sur le marché noir doivent se résigner à cette mesure improvisée.
Le problème des uniformes n'est pas négligeable. L'État n'a réussi à confectionner que 2,3 millions des 3,6 millions de pièces nécessaires, ce qui signifie que seulement 20 pour cent des élèves portera des vêtements neufs pour ce cours.
Le reste devra réutiliser des uniformes hérités, raccommodés ou achetés à des prix exorbitants : sur le marché informel, un ensemble peut dépasser 5 000 pesos, une somme qui dépasse le budget de la plupart des foyers.
L'infrastructure scolaire n'échappe pas à la crise. Des milliers de centres ont ouvert leurs portes dans des conditions deplorables, avec des toits qui fuient, des fenêtres cassées et un mobilier insuffisant.
On ne manque pas de scènes d'élèves assis par terre faute de bureaux, ou de cours interrompus par des coupures de courant, avec des enseignants et des étudiants contraints de donner des leçons dans l'obscurité ou d'attendre l'arrivée d'un groupe électrogène.
Le déficit de professeurs aggrave encore le tableau. Matanzas, par exemple, a commencé l'année scolaire avec plus de 2 000 postes vacants, et au niveau national, il manque environ 24 000 enseignants, ce qui équivaut à une place sur huit non pourvue.
Les bas salaires, l'épuisement professionnel et la migration vers d'autres secteurs ont laissé les salles de classe entre les mains d'un personnel insuffisant et, dans de nombreux cas, sans la formation adéquate.
La soi-disant "éducation gratuite" est devenue un fardeau lourd pour les familles. Un carnet de primaire peut coûter jusqu'à 1 400 pesos dans un commerce privé, une somme impayable pour la plupart. À cela s'ajoutent les sacs à dos, les chaussures, les colations et d'autres dépenses qui transforment chaque rentrée scolaire en un drame financier.
Entre le discours triomphant du régime et l'épopée fabriquée par les médias d'État, qui parlent de “rivières d'innocence” et de “faits héroïques silencieux”, se cache la véritable histoire de septembre : celle de parents qui luttent contre l'inflation et la pénurie pour que leurs enfants puissent aller à l'école avec le minimum indispensable.
C'est l'autre visage du début de l'année scolaire à Cuba, celui que la propagande ne montre jamais.
La "conquête vitale" comme instrument d'endoctrinement
En qualifiant l'éducation comme “l'une des conquêtes les plus belles et vitales de la Révolution”, Díaz-Canel ne cherche pas seulement à mettre en avant un accomplissement historique du régime, mais il révèle également le noyau idéologique sur lequel s'est construit le système éducatif cubain : l'endoctrinement comme garantie de permanence politique.
Depuis 1959, l'enseignement sur l'île est étroitement lié à la formation d'un citoyen façonné par les valeurs et les dogmes du socialisme.
La soi-disant "conquête vitale" a signifié, dans les faits, un ensemble de matières, de manuels, de programmes et de pratiques pédagogiques visant à glorifier la figure de Castro, le processus révolutionnaire et ses leaders, tout en marginalisant ou déléguant toute pensée critique ou indépendante.
La centralité de l'idéologie dans l'éducation se reflète dans l'obligation d'actes politiques, de matins patriotiques et de campagnes scolaires où se répète la rhétorique du régime.
Depuis les premières classes, les élèves sont confrontés à des consignes et à une narration qui ne laisse pas de place au questionnement ni à la pluralité. Ce modèle transforme les salles de classe en prolongement de l'appareil de contrôle social et en laboratoire de légitimation du pouvoir.
En parlant de "conquête vitale", Díaz-Canel dissimule que l'éducation, loin d'être un espace ouvert de pensée et de formation académique, a fonctionné comme le pilier de l'hégémonie politique.
La permanence de ce récit épique —l'idée que sans la "révolution", il n'y aurait ni école, ni enseignants, ni avenir— devient un mécanisme pour conditionner la perception de plusieurs générations et éviter l'émergence de voix dissidentes.
C'est là que la phrase de Díaz-Canel révèle son véritable sens : l'éducation non pas comme un droit citoyen, mais comme un élément stratégique pour maintenir le régime.
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